dimanche 1 avril 2012

Sarkozy, le pape et Molière



Nicolas Sarkozy n’est ni « une momie », ni « un robot », ni « un automate »: il l’a rappelé samedi après-midi dans son discours aux jeunes. Son cœur d’homme sensible palpite pour « la jeunesse de France », et on le sent se consumer d’humanisme et de bonté. Car Sarkozy sent venir «un désir nouveau de fraternité» et même «un besoin d’amour». Il l’a affirmé dans sa harangue de la porte de Versailles, mi christique, mi extatique. Alléluia : le bon Dieu semble s’être s’est penché sur sa couche pour insuffler au président sortant un supplément de générosité et « d’amour du prochain ». Amen.

C’est que, voyez-vous, notre pays a beau être une République laïque, et on a beau le répéter sur tous les tons lorsqu’il s’agit de lutter contre « les communautarismes », ce n’est pas une raison pour omettre, une fois de temps en temps, d’appeler à la rescousse le petit Jésus.

Sarkozy y tient beaucoup, en digne promoteur des « racines chrétiennes de la France » qu’il est devenu lors de son célèbre discours du Latran. Laïcité, oui, pourvu qu’elle soit « de collaboration », « ouverte », « positive », ou qu’un quelconque adjectif puisse lui être accolé, de manière à pouvoir tout à la fois, dans un numéro d’équilibriste digne des plus adroits saltimbanques, fustiger « les fondamentalismes » et affirmer sans ciller que « l’instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur ».

Hier, s’adressant aux « Jeunes Pops », Nicolas Sarkozy est donc passé à la vitesse supérieure. En effet, l’homme est pressé : il est déterminé à vivre « trois semaines à fond » puis encore « deux semaines à fond », ainsi qu’il l’a rappelé en fin de discours. C’est donc « à fond » qu’il a remisé le gentil pasteur pour mettre carrément l’artillerie lourde en batterie : le curé c’est bien, mais l’ancien pape, c’est mieux. Et le candidat UMP de parvenir à caser, quelque part entre l’irremplaçable général de Gaulle et les inévitables rescapés d’Auschwitz, un hommage vibrant à…Jean Paul II.

Ainsi, après avoir rappelé à une jeunesse UMPiste manifestement férue de belle architecture si l’on en juge par ses hourras enthousiastes, que son « identité », « elle est dans nos cathédrales », le président candidat formula ce conseil : « vous êtes à l’âge où l’on veut fuir, tenter l’aventure. Partez à la conquête du monde, n’ayez pas peur. C’est un grand homme qui a dit ça au début des années 80, un grand pape, Jean-Paul II », se référant ainsi au « n’ayez pas peur ! » prononcé en 1978 par le tout nouveau Saint-Père, inaugurant de ses mots son pontificat.

Ah, quel homme pieux, ce Nicolas Sarkozy ! Ou…quel imposteur : chacun jugera. Mais force est de croire que celui qui se plait à traiter régulièrement son rival socialiste de « Tartuffe » et qui, samedi encore, citait Molière comme l’un des grands auteurs du patrimoine culturel français, sait très exactement de quoi il parle.

En attendant, il reste devant nous quelque cinq semaines à vivre « à fond ».
Vive la France à fond, vive la République à fond, et vive l’Eglise à fond !

Lire et relire :
L'étrange débat de Nicolas Sarkozy   CLICK
Sarkozy : France d'en bas ou France dans l'eau ? CLACK
Sarkozy : un sale gosse en pré-retraite  CLOCK
Entretien avec Catherine Kintzler autour de la laïcité  CLOUCK
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2 commentaires:

  1. Ce qui est sûr c'est qu"il ne citera pas la Princesse de Clèves. Bigard peut-être ou Mireille Mathieu.

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  2. Il prit sans doute pour ne pas tomber en rupture de salaphiste avant la fin de la campagne.

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