Par Éléonore de Vulpillières
[Emmanuel Macron est un objet littéraire très inspirant. Je concède volontiers que ce petit billet n'a pas d'autre ambition que celle de procurer une lecture divertissante en écoutant du Bowie.]
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Emmanuel Macron a souvent été comparé à la figure balzacienne Eugène de Rastignac, petit noble désargenté et provincial qui grâce à la chance, sa volonté de parvenir, et une forte absence de scrupules, gravit rapidement les échelons de la haute société parisienne. Figure semi-littéraire, semi-technocrate, l'Amiénois fascine l'élite médiatique de notre pays. Rapidement présenté comme ayant rédigé une thèse sous la direction d'Etienne Balibar et assisté Paul Ricoeur, l'ancien ministre de l’Économie est paré d'une caution philosophico-intellectuelle qui enchante le petit milieu parisien.
Mais l'homme « En Marche » est un personnage bowien. Semblable au Major Tom du mystérieux tube Space Oddity chanté par David Bowie en 1969, Macron a été lancé en orbite dans l'espace politique. Rapidement, la tour de contrôle (Ground Control) perd le lien. Surplombant la lune (« far above the moon »), « flottant de la façon la plus particulière qui soit » ( floating in the most peculiar way »), l'astronaute ne veut plus redescendre.
Mise sur orbite éclair
À 38 ans, celui dont la carrière politique a été lancée comme une fusée par des apparatchiks vieillissants du Parti socialiste (Hollande en tête), qu'il a rapidement dépassés et ringardisés, ne veut plus redescendre sur Terre. C'est ce qu'on a entrevu au lendemain du terne débat qui opposa les ternes candidats à la primaire de la mal nommée Belle Alliance Populaire – union de circonstance qui est aussi belle et populaire que la République populaire démocratique de Corée du Nord est populaire et démocratique. Entre un Montebourg au verbe lisse et aux aspérités gommées, un Valls aussi automatique qu'à son habitude et l'inconnu Jean-Luc Bennahmias dans le rôle du bouffon de la soirée, la plupart des commentateurs ont donné Macron comme vainqueur du débat. Gagnant par contumace (terme juridique issu du latin contumacia, qui signifie orgueil).
Le même pas quadra Macron a éclipsé toute une génération de quinquas passés par toutes les étapes du cursus honorum, en attendant patiemment leur heure. Et qui ont l'impression insupportable de se faire dégager à grands coups de lattes par le petit impertinent. Car il remplit des salles, lui. Quelle rancœur doit-on éprouver à la tour de contrôle solférinienne ! Imagine-t-on Thomas Pesquet sortir dans l'espace muni de suffisamment de réserve d'oxygène pour aller faire son petit tour solo sans plus obéir à quiconque ? L'audace n'a plus de limites, et l'audacieux s'est envolé trop loin de la base spatiale.
Que deviendra l'auto-proclamé Rebel Rebel de la politique ? D'emblée, force est de constater qu'il remporte un succès juvénile ( juvenile success ).
Le sauveur de l'humanité
Au-delà de Major Tom, le personnage principal de la mythologie bowienne est Ziggy Stardust, cette figure humaine à l’intelligence extraterrestre, venue apporter de l’espoir sur terre à une humanité qui se meurt. Et Macron, c'est ce jeune surdoué qui veut dynamiser la France des start-up et des « gens qui bossent », dans une société affaiblie et ramollie par des politiques inertes. Avec son mouvement En Marche, – aux initiales modestement identiques aux siennes –, il entend tout révolutionner. Au sens Tancredi du Guépard, « il faut que tout change pour que rien ne change ». Certes, cet homme qui se présente comme un non professionnel de la politique au point de ne pas savoir poser sa voix dans ses discours, a bien moins de charme et de poésie que Stardust. C'est davantage le côté « salvateur marginal » qui attire ici l'attention.
Dans Starman, Bowie décrit l’arrivée imminente d’un sauveur venu de l’espace à la rescousse de l’humanité en péril. Celui qui est décrit dans la chanson n'est certes pas les bras en croix, ivre de puissance et vociférant des imprécations sur des notes suraiguës, acclamé par un auditoire conquis. C'est un homme étoile, qui attend dans le ciel ( waiting in the sky ) d'aller à la rencontre de l'humanité. Macron est un Starman qui aurait sauté le pas.
Une trajectoire tragique
Malheureusement, les parcours solaires de Major Tom et Stardust se finissent mal :
« Ashes to ashes, funk to funky
We know Major Tom's a junkie. »
Major Tom, la cendre redevenue cendre. Stardust, l'étoile qui n'est que poussière.
L'astronaute qui ne touchait plus terre est en réalité un drogué revenu de son trip. En phase de « descente », le visage blême collé au bitume. La campagne Macron, lancée comme l'éclair par des médias béats d'admiration devant ce « phénomène » se finira-t-elle aussi en bad trip ou reflète-t-elle un véritable courant, durable dans l'opinion ? Ziggy connaît une évolution aussi triste que Major Tom.
« Making love with his ego,
Ziggy sucked up into his mind
Like a leper messiah. »
Et Ziggy fait l'amour à son ego, se rongeant le cerveau, semblable à un messie lépreux qui sera tué par ses fans. Un sauveur misérable, abandonné de tous, qui ne parvient même plus à se sauver lui-même.
Nous ne souhaiterons pas à l'ancien employé de la banque Rothschild de finir ainsi.
Ni d'être l'homme qui vendit le monde (The man who sold the world), autre titre de Bowie.
Article initialement paru sur le blog Giroflée des murailles
Excellent ! .. Macron est beaucoup moins sexy que Bowie et il chante beaucoup moins bien. Disons que sa voix d'ado grandi trop vite a tendance à partir un peu trop dans les aigus.
RépondreSupprimerJe ne vois pas ce que Macron vient faire dans cet article ! Juste une pub de plus pour cet opportuniste de droite qui se plaît à nous faire croire qu'il est de gauche. Son projet est de donner à la famille Rothschild les clefs de la France. Voilà le seul projet de ce fourbe .
RépondreSupprimerUn régal à lire.
RépondreSupprimerLa question est: Can this (not that) absolute beginner be a hero... just for one day?