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samedi 4 août 2012

Bruxelles voit la science en rose pour les filles



Je m’apprêtais, avant de partir tranquilou en vacances, à annoncer ubi et orbi la fermeture estivale de « l’arène nue ». J’allais me ruer dans un train « ID-TGV » afin de m’aller agglutiner sur quelque plage où profiter pleinement des remugles d’huile de monoï rance et de sueur tiède émanant du corps bronzé mes semblables. Las, tout à coup, la Commission de Bruxelles se rappela à mon bon souvenir, dans des circonstances qui m’obligent à rouvrir brièvement la boite à indignation. Explications.  

J’avais raté l’info, mais elle circule depuis fin juin : la Commission européenne vient de lancer une campagne intitulée « science is a girl thing ». Et elle a eu l’idée lugubre de faire cela…en images :




Dans cette vidéo, rien ne manque. Trois « pouffes », une blonde, une brune, une noire (pardon, une "issue de la diversité") se dandinement sottement sur talons hauts et sur fond rose-cucul en riant à gorge déployée, car comme chacun sait, la femme est un être frais et enjoué qui s’esclaffe du soir au matin.

La raison de leur hilarité ? Elles viennent d’embrasser une carrière scientifique et de découvrir les secrets de la fabrication…du fond de teint ! Du coup, un beau gosse qui n’en croit pas son microscope les regarde avec une concupiscence discrète et contenue, témoignant ainsi que faire des sciences demeure la meilleure façon, pour une fille, de se trouver un beau mari bien élevé. 

Les cinquante-trois secondes de cet étalage compact de clichés imbéciles s’achèvent par le slogan « science is a girl thing », le « i » de « science » étant remplacé par un tube de rouge à lèvres, histoire d’achever de convaincre les sourds, les bouchés et les mal-comprenants.

Ce n’est pas tout. A en croire Rue89, qui avait déjà signalé la chose, la gabegie ne s’arrête pas là. Cette campagne, lancée par l’UE pour lutter contre la sous-représentation des femmes dans les métiers scientifiques, dispose également de son site Internet, décoré aux mille et une couleurs pastel du monde merveilleux de Bisounours. Par exemple, un petit encart rose-neuneu invite à découvrir « why you’ll love science », avec tout plein de jolis cœurs partout, parce qu’on sait combien les filles sont douces et sensibles, y compris les futures manipulatrices d’éprouvettes remplies de produits hautement inflammables, les passionnées de satellites lunaires,  et les aficionadas de la fabrication de missiles sol-sol moyenne portée avec capacité d’emport d’une charge nucléaire.

La campagne, apprend-on enfin, proposera aux étudiantes une exposition itinérante qui parcourra l’Europe dès la rentrée 2012. Laquelle exposition est présentée en ces termes : « les jeunes filles y seront par exemple invitées à réaliser elles-mêmes un baume à lèvres, ou visiter un “ bar à oxygène ” dans lequel elles devront identifier différents arômes tels que la menthe, le chocolat ou la fraise »….

Bien vu la Commission européenne ! Pour les garçons, l’odeur du souffre et l’acide chlorhydrique, pour les demoiselles la fraise et le chocolat ! Pour les garçons, les bagnoles et les tractopelles, pour les fifilles, le maquillage !

On se demande bien de quoi aurait l’air une campagne de publicité européenne visant à inciter les femmes à devenir médecin. Que leur promettrait-on ? D’apprendre à injecter avec dextérité l’acide hyaluronique visant à combler les première rides ? De maîtriser sur le bout des doigts la recette du régime hypocalorique miraculeux qui permet de perdre « 14 kilos en trois jours sans effort » ? Ou de découvrir les secrets de l’auto-pose d’un stérilet ?

Je laisse le soin à mon aimable lectorat de répondre à l’ensemble de ces questions. Pour ma part, je fonce m’enduire de quelque pommade « senteur des îles » et enfiler ma jupette fushia ras-le-bonbon pour m’aller trémousser au Coco Loco de Trifouillis-les-Bains. Le tout en suçotant une glace low calories « fraise Tagada / vanille intense », pour nous, les filles. Rendez vous sur « l’arène nue » à  la rentrée.

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4 commentaires:

  1. Eh bien, je peux être sûr de faire dans mon froc à chaque visite du bouge-crado d'la mère Delaume, ah ça ! Merci bien.

    Je crois qu'il n'y a rien de surprenant ou de boulversifiant, le bon sens règne sur la Commission comme le Roi sur la Belgique, à tel point qu'il ne serait pas injuste de proclamer que le bon sens y règne mais n'y gouverne pas.

    Il faut dire que cette institution a la fâcheuse tendance de faire ses grosses commissions à la vue et au sus de tous et sans honte. Ainsi de ces courgettes baroques, millimétrées par cette Sainte Institution ô combien infaillible(règlement 1677/88).

    Les néants de Bruxelles ont cette remarquable aptitude de pouvoir combiner à la fois la précision absurde du biologiste moléculaire dans les sujets les plus divers et les plus anodins, et la grâce du pachyderme dans d'autres occasions, certes moins importantes que le calibrage de courgettes (des femmes en science, laissez moi rire).

    Bref, je me suis bien marré en vous lisant, et je ne doute pas qu'après avoir manipulé le clavier vous vous en alliez aussi aisément manipuler des hommes (à défaut d'éprouvettes), damnée gourgandine, tant il me paraît évident qu'outre une attraction atavique envers ce qui brille et ce qui est couleur bonbon, la femme se distingue par une perfidie séculaire (e suis d'ailleurs surpris qu'après force gloussements ces trois grues n'aient pas décidé de corrompre ce jeune homme pur).

    Sur ce, je vous quitte pour m'en aller lustrer ma bagnole à coups de bières et de sueurs.

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  2. "Le tout en suçotant une glace low calories « fraise Tagada / vanille intense », pour nous, les filles."
    Et en buvant du Pschitt.

    En 1946, la pub pour Pschitt était quasiment moins sexiste:
    Pour toi mon ange du Pschitt orange
    Pour moi garçon du Pschitt citron

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  3. Bonjour,
    C'est vrai qui le clip est particulièrement débile. Marie Curie doit se retourner dans la tombe à la vue d'un truc aussi stupide. Mais qu'attendre de la commission de Bruxelles ? Les élites de Bruxelles, en ces temps de crise mondiale majeure, ne semblent pas avoir d'autres priorités que de pondre des trucs aussi insignifiants, et en plus bêtement méprisants pour les femmes.
    Et combien ça a coûté cette connerie vraiment bête ? Très très cher j'imagine. Mais l'Europe, qui n'est pas du tout en crise a plein d'argent à gâcher....

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  4. @Suzanne:

    "Pour toi mon ange du Pschitt orange
    Pour moi garçon du Pschitt citron", dites-vous.

    "... le dessert que tu préfères:
    C'est la vanille pour les p'tites filles
    Et le citron pour les garçons", chantait Henri Dès dans les années 1980.

    La chanson est un éternel recommencement... sauf que je préfère les desserts à la vanille. Qu'est-ce que tous ces gaillards ont donc à vouloir me faire à tout prix ingurgiter du citron parce que je suis un mec? ;-)

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