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samedi 13 octobre 2012

Fusion ratée EADS/BAE : les allemands sont-ils très très méchants ?

 

 
Si la fusion entre les avionneurs franco-allemand EADS et britannique BAE avait eu lieu, on aurait eu un joli jouet. Une bonne grosse boite industrielle 100% européenne, capable de mettre la pile à l’américain Boeing, c’est sûr, ça aurait eu de la gueule. On peut même imaginer qu’à coup de « rationalisation » - comme on dit – ça aurait fini par créer quelques emplois, nonobstant la contraction des budgets de la Défense, en Europe comme aux Etats-Unis.
 
Las, cette affaire a tourné court, et l’Union devra se contenter, à titre de lot de consolation, d’un prix Nobel de la Paix dont on ne doute pas qu’il sera aussi utile à l’édification de l’espèce humaine que celui obtenu en son temps par l’élégant Barack Obama.
 
L’affaire a capoté, donc. Elle s’est heurtée à un « nein » allemand, comme aime à le répéter la presse écrite, que le simple fait de publier les quatre lettres N-E-I-N semble faire beaucoup rigoler, sans qu’on sache trop pourquoi. L’Allemagne a eu peur, semble-t-il. Peur que les activités d’aéronautique civile se concentrent à Toulouse, comme c’était prévu. Peur que la partie militaire ne revienne à l’Angleterre, et que dans cette affaire, l’Allemagne soit le dindon de la farce. Angela Merkel a donc fait capoter le truc : un peu logique non, présenté comme ça ?
 
Ce qui est mignon, du coup, c’est d’entendre ceux-là même, habituellement si prompts à traquer le « germanophobe » qui sommeille en chaque européen depuis l’Anschluss de 1938, conspuer la chancelière avec la dernière énergie. Le journal LeMonde, pour ne citer que lui, se désolait vendredi matin de l’égoïsme allemand. Lui qui croyait la veille – voir l’édition de jeudi 11 – que la fusion achopperait sur l'étatisme archaïque et atavique qui gangrène la France, se trouva trouvé fort dépourvu lorsque le « nein » fut venu.
 
Et de pleurnicher. Quoi, l’Allemagne refuserait de brader des emplois industriels en pleine tempête économique mondiale ? Qui plus est à un an d’élections majeures ? Si c’est pas là la preuve de ignominieuse « double duplicité chez Angela Merkel » ! Et le quotidien de dénoncer, sans blague, le « provincialisme » de nos cousins germains (on ne parle plus de « nationalisme » allemand depuis 1945 car ça fout la trouille à tout le monde).
 
Il y en a donc qui, dans les meilleures rédactions de France, découvrent en 2012 qu’un pays, même membre de l’UE, défend généralement ses intérêts de nation d’abord, et fait passer l’Europe après. Incroyable : l’Allemagne n’est donc pas un pays masochiste !
 
Faites gaffe, tout de même, les petits gars du Monde à ne pas cogner trop fort. Parce que bon, « double duplicité », « provincialisme politique» et « impérialisme industriel », ça fait quand même beaucoup. A ce rythme-là, la germanophobie n’est plus très loin….
 
 
Lire et relire
Dr Angela et Mrs Merkel, Janus allemand  CLICK
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2 commentaires:

  1. Encore un très joli billet :-), Coralie. Proficiaat !!
    Comme d'habitude, les oui-ouistes du Monde font peu de cas des différences d'opinions des peuples européens, et donc de leurs divergences d'intérêts.
    Ce n'est pas parce que la démocratie est enrayée en France qu'elle doit l'être partout par ailleurs: l'Allemagne n'a fait que défendre ses industries et les intérêts de ses citoyens.
    Je tire trois leçons de cette affaire:
    - la première, c'est que le volontarisme politique n'est pas mort, n'en déplaise à M.Montebourg: la RFA a sauvé (pour combien de temps encore?) des emplois.
    - la deuxième, qui est un corollaire, c'est que l'Etat actionnaire a autorisé une fusion EADS-BAE qui aurait coûté des milliers d'emplois hautement qualifiés dans le domaine de l'aéronautique, secteur de pointe s'il en est.
    - la dernière, c'est qu'il est totalement indifférent pour le Gouvernement qu'EADS tombe sous la coupe des intérêts Anglo-Saxon, donc US. Ce qui me conforte sur le caractère altantiste de l'UE en général, et sur le peu de cas que les socialistes font des intérêts stratégiques du pays.

    Pour ma part, je salue cet échec et l'attitude de l'Allemagne: pour le coup, le patriotisme germanique a rendu service au patriotisme français :-))).

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  2. "A ce rythme-là, la germanophobie n’est plus très loin…."

    Au Monde, la germanophobie est épisodique mais l'étatophobie est permanente depuis au moins 68.

    La dénonciation du provincialisme et de l'impérialisme économique ne serait-elle pas aussi une manière de dissuader un gouvernement français auquel viendrait l'idée saugrenue de défendre des intérêts de nation ? Au lieu de s'occuper préférentiellement d'exaucer les phantasmes des aspirants intellectuels de sa rédaction ?

    En matière de provincialisme, deux anciens de la maison soutiennent que le Monde sait de quoi il parle :

    http://www.xerficanal.com/eric-fottorino-la-tragedie-du-journal-le-monde-grandeur-et-decadence-429.html?PHPSESSID=fc157b18b103b758f6441b1fa89bcdfb

    Quant à la double duplicité...

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