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mardi 25 juin 2013

Critiquer Barroso : et après ?




« Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes », disait Bossuet. Le Parti socialiste doit beaucoup faire rire Dieu.

Au PS, on a d’abord crié haro sur Angela Merkel, dénonçant son « intransigeance égoïste ». Oh, surprise ! On découvrait incrédule qu’un dirigeant en campagne électorale cherche plus volontiers, dans une Europe qui demeure un agrégat d’entités nationales, à satisfaire ses concitoyens et électeurs qu’à contenter ses voisins !

Mais Angela Merkel n’est pas une cible facile. En tant que « reine d’Europe », elle est tout à fait nulle. Mais en tant que chancelière allemande, il semble qu’elle fasse l’affaire. C’est en tout cas ce que pensent les allemands, qui la reconduiront sans doute en septembre.

On a donc trouvé une autre cible en la personne de Jose Manuel Barroso, qui pour sa part, à la décharge de ceux qui le conspuent, est effectivement nul, et sur à peu près tout. Arnaud Montebourg lui a donc imputé d’être le « carburant du front national », ce qui est lui faire trop d'honneur. Car c'est à la fois un peu vrai et un peu…court.

Tellement court que même Jean Quatremer – cette boussole qui indique le Sud - s’y adonne dans Libération du jour, dépeignant un « Européen pro-américain à veste réversible ». Barroso un atlantiste ? Rhôôô, ben ça alors, c’est vraiment très mal ! On lui rafraîchit la mémoire, concernent feu Jean Monnet, ou le laisse croire que le phénomène est nouveau ?

Surtout, le président de la Commission européenne ne dispose jamais que du pouvoir que les Etats lui ont consenti, à lui et au bidule carcéralo-fédéral dont il est le patron.

François Hollande a fort bien mimé l’étonnement et la colère, au moment de recevoir les recommandations de l’exécutif européen au mois de mai. Il lançait alors, drapé dans une indignation rudement bien interprétée : « la Commission européenne n’a pas à nous dicter ce que nous devons faire ».

Pourtant, il n’y avait rien là que de très prévisible, dans la droite ligne de la série de réformes – six pack, semestre européen, two pack - adoptées par le Parlement européen sans que personne, au sein des États membres, n’y trouve à redire.

De fait, le semestre européen le prévoit explicitement : chaque année, au mois de mai, la Commission adresse aux États des « conseils personnalisés » pour qu’ils puissent répondre aux priorités économiques et budgétaires qu’elle a définies durant les mois précédents.

Le two pack, quant à lui, est entré en vigueur le 30 mai, entrainant ce commentaire sardonique du journal La Tribune : « le gouvernement économique européen est né, et il ne plait pas à François Hollande ». En vertu des deux textes qui composent ce pack, les États devront désormais publier, à l’automne de chaque année, leur projet de budget pour l’année suivante. A charge pour la Commission - celle-là même qui « n’a pas à nous dicter ce que nous devons faire » - d’examiner ces projet et de formuler des observations.

Alors, surpris, messieurs Hollande et Montebourg ? Barroso est-il très très méchant, ou s’est-il simplement saisi des prérogatives qu’on lui a offertes ?

Plus sérieusement, il semble aujourd’hui dérisoire de dénoncer un homme, aussi urticant soit-il, lorsque c’est un ensemble institutionnel qui dysfonctionne. La Commission européenne est un organe à caractère fédéral dans une Europe qui, elle ne l’a jamais été, et l’est de moins en moins, sous l’effet des trajectoires de plus en plus divergentes des Etats-membres.

La droite allemande semble en avoir pris conscience. Le programme électoral de la CDU-CDU plaide en effet pour une Europe de « l’unité dans la diversité » et rejette l’idée d’une Union « organisée et dirigée de manière centralisée ».

On aimerait savoir ce qu’en pense - pour de vrai, pas juste pour déconner - la gauche française.


15 commentaires:

  1. C'est simple, après il faut s'inscrire à l'UPR.

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  2. Arf, non. Je préfère rester à gauche.
    Il finira bien par s'y passer quelque chose, à gauche, bon sang...

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  3. Mardi 25 juin 2013 :

    Anglo Irish Bank : les deux dirigeants auraient menti aux autorités irlandaises.

    Les dirigeants de la banque irlandaise Anglo Irish Bank nient avoir trompé les autorités de Dublin pendant la crise financière en 2008, suite à la publication de discussions enregistrées au téléphone.

    Ces discussions révèlent que les dirigeants de l’Anglo Irish Bank – qui n’existe plus sous ce nom aujourd’hui – avaient sciemment sous-estimé les sommes nécessaires au sauvetage de la banque.

    Selon l’Irish Independent qui s’est procuré les enregistrements, les deux dirigeants de la banque parlaient de 7 milliards d’euros pour ne pas risquer un refus de Dublin, alors que l’addition pour les contribuables irlandais allait finalement avoisiner les 30 milliards d’euros.

    http://fr.euronews.com/2013/06/25/anglo-irish-bank-les-deux-dirigeants-auraient-menti-aux-autorites-irlandaises/

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  4. Il y a une effectivement forte analogie entre la posture du PS qui semble mettre tous les dysfonctionnements de l'UE sur le dos d'individualités, et la posture Sarkozyenne qui mettait tous les errements du capitalisme sur le compte de brebis galeuses (Madoff et consorts).

    La liste de toutes ces coïncidences est telle que cela ne semble pas être le fruit du hasard. La question qui demeure, c'est : est-ce que cette incapacité à remettre en cause le système est consciente, ou est-ce que cela trahit l'état d'aliénation idéologique de nos dirigeants?

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  5. @Coralie Delaume,
    qui vous dit que l'UPR est un mouvement de droite? A priori, c'est un rassemblement provisoire dont l'unique but est la dénonciation par la France des traités l'UE et de l'OTAN.
    Il est vrai que F.Asselineau, le président de l'UPR, est un ancien Pasqua-boy, mais la grande majorité des critiques qu'il formule sur l'assujettissement de la France visent juste et sont cohérentes. Et plus intéressant, il rappelle à quel point la France, pays jadis ouvert sur les cinq continents, s'est progressivement désintéressée de ce qu'il se passe dans le monde pour se replier dans une Europe qui n'est pas vraiment favorable à ses intérêts...
    Maintenant, tout n'est pas rose à l'UPR: du fait de son passé de dirigeant de cellules consacrées à la guerre économique, il a un fort tropisme anti-américain, qui le rend parfois ses démonstrations complotistes. Egalement, je critique sévèrement son isolement volontaire et son sectarisme, digne des pires chapelles trotskistes: cela donne un petit côté "ralliez mon panache blanc", qui peut être sympathique mais franchement inefficace. Enfin, il me semble que l'UPR soit un peu trop personnel, et le risque vient du fait qu'il dépend bien trop de la personnalité de son fondateur, ce qui n'est jamais bon signe...
    A mon humble avis, la seule question à poser est celle des alliances: est-ce qu'un parti de gauche républicain, social, patriote et jacobin (bref, un parti à votre goût, chère Coralie...) peut s'entendre avec un mouvement comme celui de l'UPR? A mon avis, oui, mais la grande tragédie, c'est que la gauche que je viens de décrire est morte il y a 30 ans. Donc faute de mieux, l'UPR n'est pas foncièrement une mauvaise idée...


    CVT

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    1. Oui, il y a effectivement un côté "complotiste" que je trouve vraiment dommage. Je ne pense pas être plus naïve que ça, mais j'ai du mal à croire qu'il y ait un agent américain derrière chaque pot de fleur ;-)

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    2. Avec ce nouveau scandale lié à la Nsa, continuez donc de fermer les yeux . Il n' y a pas pire idiot que celui qui ne veut pas comprendre .
      Bonne continuation

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  6. L'électroencéphalogramme de la gauche est aussi plat que celui de la droite.

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  7. Quand on voit les "analyses" que viens de pondre le collectif de la revue economie et politique ( voir la réponse de Sapir:http://russeurope.hypotheses.org/1381) on ne peut que partager le diagnostic de CVT: la gauche est morte ; attendre un parti de gauche digne de ce nom , c'est rejouer le désert des tartares ; et pendant ce temps là, la destruction des fondamentaux du pays continue ; alors l'UPR, avec ses imperfections, elle se bat pour l'indépendance du pays, et sans la moindre concession au FN, sur lequel elle n'a aucune illusion, et en refusant tout racisme ; refuser ce combat pour être sur de ne pas se compromettre avec des gens de droite, c'est refuser le CNR en 43 au motif que De Gaulle était un général de culture maurassienne

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    1. Mais ça n'a rien à voir avec le fait de se compromettre. Il s'agit d'essayer de convaincre. Je ne suis pas sure que l'UPR parvienne à convaincre en demeurant complètement en marge des partis traditionnels. Les gens qui se mettent trop en marge cessent d'être audibles. Il y a deux jurisprudences à gauche : la Chevènement, puis la Mélechon. Enfin, non : Mélenchon est audible. Mais électoralement, ça prend pas, si l'on en juge par les législatives partielles. Et à droite, NDA est très seul.

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    2. Mélenchon n'est pas audible,il est incohérent: vilipender la résultats de la construction européenne, qui ne peuvent pas être autre chose que ce qu'il sont ( Kessler: le programme de bruxelles est celui du medef), pour conclure qu'il ne faut surtout pas en sortir et traiter les partisans de la sortie de maréchalistes, c'est une escroquerie intellectuelle . et De de gaule aussi était un marginal, en juin 40

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    3. @Coralie Delaume,
      le grand problème de Mélenchon et de Dupont-Aignan, c'est que l'UE est une ligne de fracture: soit on y reste, soit on en sort, mais pas les deux en même temps! Pour moi, il faut ABSOLUMENT en sortir et c'est un préalable!
      La grande faiblesse de ces deux leaders politiques vient du fait que leur électorat refuse la sortie du pays de l'UE; pire, ils prétendent la réformer, tout en restant ultra-critique. L'alter-européisme (et sur cette question je suis du même avis que F.Asselineau) est un leurre qui sert à prolonger la durée de vie de l'idée européenne, complètement antinomique de l'intérêt et de l'indépendance française. En plus, de par ma culture de gauche radicale, je pense que cette démarche alter-européiste est vouée à l'échec car je ne crois pas à l'entrisme: on finit toujours par intégrer un système qu'on prétend subvertir, comme le propose le FdG ou Debout la République.
      A vrai dire, en terme de clivage droite/gauche, il faut raisonner comme en mécanique :): toute équation décrivant un phénomène n'a de sens que dans un référentiel donné. Mise en application en politique, ça veut dire que les notions de droite et de gauche n'ont de sens que si notre pays est souverain en matière politique, économique et judiciaire. Pour être plus clair, le clivage gauche/droite est aujourd'hui inopérant car, comme le disait si bien le regretté Ph.Seguin, du fait de l'abdication de notre souveraineté, droite et gauche se fournissent à la même centrale d'achat: l'UE.
      Donc le retour d'un choix politique passe forcément par la sortie de l'UE, ce que ne semblent pas comprendre ni Mélenchon (ou du moins, de ce que je connais de mon expérience, la base de son parti) ni NDA (là, je suis moins connaisseur, mais je me fie à votre collègue blogueur L.Pinsolle).

      CVT

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  8. Ravi de voir un article de l'excellent Romaric Godin (la Tribune) référencé dans l'Arène nue.

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  9. Juste pour dire que j'approuve totalement les commentaires de CVT et de JMP. Pour ma part, j'ai adhéré en 2010 à l'UPR faute de mieux et j'y ré-adhère chaque année depuis faute de mieux. "Les gens qui se mettent trop en marge cessent d'être audibles", dites-vous Coralie, mais nous sommes dans un contexte où les "partis traditionnels" se sont mis en marge de leur électorat (au grand bénéfice du F"N" d'ailleurs), alors… Je vous rappelle aussi, Coralie et CVT, qu'il existe deux partis à gauche qui pourraient correspondre au portrait-robot dessiné en creux dans ce fil de commentaires : le MPEP et le POI (vous connaissez sans doute). Concernant le MPEP, on ne peut pas dire qu'ils se mettent en marge de la même façon que l'UPR, puisqu'ils ne cessent de frapper à la porte du Fd"G" (et ne cessent de ramasser des gros râteaux, mais c'est là que les dirigeants PCF et PG déconnent à bloc, à mon avis).

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  10. @Joe Liqueur,
    à ma connaissance, seuls deux partis ont inscrit sur le profession de foi électorale la sortie de l'UE: l'UPR et le POI (ex-Parti des travailleurs, troisième branche trotskiste, ancien parti de Jospin et...Mélenchon!). Donc il n'y a que deux partis qui militent officiellement pour une sortie des traités européens et de l'OTAN (on l'oublie trop souvent, celui-là).
    Tous les autres partis eurosceptiques sont moins clairs: le M'PEP de J.Nikonoff milite désormais plus ouvertement pour la sortie de l'UE, alors que du temps où je militais au PG (donc au FdG), ils étaient moins affirmatifs et avaient vendu le concept de désobéissance européenne à Mélenchon, afin de ne pas effrayer les autres composantes beaucoup plus pro-européennes du FdG. Malgré cela, ils sont restés isolés, et je pense que Nikonoff a pris le parti d'assumer ouvertement son tropisme anti-UE plutôt que de finasser avec un alter-européisme illusoire.
    Mainteant, je crois que le M'PEP parti est atteint des mêmes travers que celui d'Asselineau, notamment en terme de personnalisation du pouvoir et de sectarisme (moins dur tout de même que celui d'Asselineau, car ce mouvement veut faire des alliances). Egalement, Nikonoff traîne comme un boulet ce qu'il s'est passé lorsqu'il a quitté le mouvement ATTAC dont il était pourtant l'un des membres fondateurs. La raison pour laquelle ATTAC a échoué était relativement simple: en plus des querelles de personnes et des allégations de fraude, il y avait un véritable affrontement idéologique entre les anti-mondialistes (dont faisaient partie Nikonoff) et les altermondialistes (la direction actuelle), division qui se retrouve dans toute la gauche. Or, comme on a pu le constater par la suite, ATTAC est désormais plus proche des libéraux mondialistes que des patriotes républicains...
    Tant que l'audience de ces derniers sera aussi confidentielle, je pense que la complainte de Coralie sera toujours d'actualité....

    CVT

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