Voici une tribune collective que nous avons signé avec Steve Ohana (auteur de Désobéir pour sauver l'Europe), Jean-Jacques Ohana (président de Riskélia), Thomas Porcher et Frédéric Farah (auteurs de Tafta, l'accord du plus fort). Elle est parue sur La Tribune le 3 mars 2015.
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Alexis
Tsipras a été élu le 25 janvier sur un champ de ruines après cinq
années « d'ajustement structurel » imposé par la
Troïka : un PIB amputé de 25%, plus de 1 200 000
emplois détruits, un triplement du taux de chômage en cinq ans
(2009 et 2014), cependant que les salaires baissaient sur le même
période de 38% et les pensions de 45%. En somme, une crise sociale
et humanitaire sans précédent, avec son lot de dégâts humains :
explosion du nombre des suicides, des dépressions, de la mortalité
infantile....
Le
désastre grec est le reflet du naufrage économique, social et
politique de tout un continent : le PIB de la zone euro est
aujourd'hui de deux points inférieur à son niveau de 2008 et le
taux de chômage y est toujours supérieur à 11%, plus du double
chez les jeunes. L'élection de Syriza a donc marqué pour les Grecs
et pour une grande partie des peuples de la zone euro l'espoir d'un
renouveau du logiciel intellectuel de la zone euro.
Le
gouvernement Tsipras a été dès le premier soir face à un dilemme
cornélien : appliquer son programme de rupture avec l'austérité
européenne tout en demeurant dans la zone euro. Alexis Tsipras et
son ministre des finances Yannis Varoufakis ont cru qu'il pouvait
exister un « autre euro », plus compatible avec les
intérêts de la majorité des Européens et avec la raison
économique.
Mais
le vendredi 20 février.... La suite dans La Tribune !
Pseudo-miracle
RépondreSupprimerLes temps sont incertains.
Grèce contre euro, tout peut arriver.
C'est le propre des circonstances exceptionnelles telles que celles que nous vivons.
Tout peut arriver, le meilleur comme le pire.
Même si l'une des issues est tellement plus probable... au moins pour commencer…
La foule est contre la Grèce, comme elle était contre la femme adultère, elle l'a condamnée, elle ne veut rien entendre, elle est sûre de son bon droit, elle l’asphyxie par devoir, pour la bonne cause, pour la justice, elle sait qu'elle fait souffrir mais continue, convaincue que sa victime n'a que ce qu’elle mérite, qu’elle l’a bien cherché, que tout est de sa faute...
Il suffirait que l'un des membres de la foule ouvre les yeux, renonce, pour que les autres l'imitent, le suivent, renoncent à leur tour, et la Grèce serait sauvée. L'euro non, mais la Grèce oui. Est-il si contraire aux valeurs européennes de préférer le salut d’un peuple à celui d’une monnaie ?
Que faut-il dire pour qu’au moins l’un d’eux, pour qu’au moins l’un des pays de l’eurogroupe, ouvre seulement les yeux ? « Que celui qui n'a jamais péché... »
Ce serait un miracle. Non, un pseudo-miracle seulement en réalité, car qui ne connaît l'histoire ?...
Ce pseudo-miracle aura-t-il lieu ? se rendront-ils compte de ce qu’ils font ceux qui asphyxient la Grèce au nom de leurs certitudes ?
Bravo pour ce texte !!!
RépondreSupprimerJuste une petite question sur ces mots : "la menace de blocus monétaire agitée par la BCE puis la dégradation rapide des conditions de liquidité du système bancaire grec ont forcé le gouvernement grec fraichement élu à renoncer à une large part de ses promesses de campagne. Ce premier round de négociations a fait apparaître une Grèce déterminée mais rendue incapable d'inverser fondamentalement le rapport de force en raison de son isolement sur la scène européenne et de l'absence de solidarité des autres pays d'Europe du Sud. "
Pensez vous réellement que dans la façon où se sont déroulées les premières négociations, Aléxis Tsipras a échoué ou du moins s'est heurté à un mur et a du renoncer à ses promesses de campagne ?
Je pense au contraire que tout s'est parfaitement déroulé comme Aléxis Tsipras l'avait prévu et que pour l'instant il suit parfaitement sa stratégie à la lettre. Syriza appliquera son programme... mais en dehors de la zone €uro. Je pense au contraire qu'Aléxis Tsipras sait parfaitement que :
- la Grèce va et doit sortir de l'€uro (Syriza a d'ailleurs dans les scrutins précédents toujours voulu sortir de la zone €uro, sauf celui-ci, ce qui lui a donné la victoire électorale. Je ne pense pas qu'ils ont changé d'avis. Il s'agissait juste d'une tactique électorale)
- l'Allemagne ne peut pas céder (Coût exorbitant pour l'Allemagne : transferts budgétaires trop importants)
- Pas un seul gouvernement des autres pays européens n'aura le courage de s'opposer à Angela Merkel.
Le dénouement final de cette lutte est connue d'avance : la sortie de la Grèce de la zone €uro. Aléxis Tsipras le sait parfaitement. Sa stratégie est simplement d'en faire porter la responsabilité entière à Angela Merkel aux yeux du peuple grec.
Le rouleau compresseur politico médiatique depuis des années ressasse toujours le même discours : "la Grèce ne respecte pas ses engagements, elle ne veut pas rembourser ses dettes, elle a vécu au dessus de ses moyens, etc... Bref, c'est de sa faute ! S'ils ne respectent pas leurs échéances, les grecs pourront être exclus de la zone €uro, bla, bla, bla..."
Hors durant toute la période des négociations, Varoufakis et Tsipras ont régulièrement fait des propositions de solutions (obligations perpétuelles...). Ils ont fait le tour de toutes les capitales Européennes. Ils ont toujours avancé que des solutions allaient être trouvées. Bref leur stratégie était d'être acteur et force de proposition. Et cela a eu pour conséquence de mettre l'Allemagne sur la défensive et de l'obliger à devoir dire toujours 'Nein", sans avancer d'autres solutions à part bien sûr de payer une dette que tous les spécialistes savent non remboursable. La forte montée de la popularité de Tsipras en Grèce est du à cette stratégie et a suivi la pente de la fierté nationale enfin défendue par les grecs (leur gouvernement élu), pour les Grecs (peuple), au nom des Grecs (respect des promesses de campagne et de l'élection).
Varoufakis a toujours tenu le même discours aux dirigeants européens : "Aidez nous à rester dans la zone €uro en luttant contre la crise humanitaire". Tout en sachant bien que les deux objectifs sont incompatibles.
Le but de Tsipras est juste de commencer à préparer son peuple à la sortie de l'€uro par la faute de l'intransigeance de l'Allemagne. Le premier ministre grec pourra dire dans quatre mois : "vous voyez bien, nous pouvons nous démener durant des mois, leur parler de la crise humanitaire provoquer par leur politique, leur réponse est toujours 'Nein"."
RépondreSupprimerDans quatre mois, si les positions sont toujours les mêmes et si Syriza a bravé l'ex Troika en lançant les réformes les plus populaires, Alexis Tsipras aura juste à faire un référendum en posant cette question : " Voulez vous rester dans la zone €uro et continuer à subir la seule politique possible d'austérité ?"
A mon avis, le résultat du référendum est connu d'avance.
Et je peux vous dire que ce jour là (le jour de l'annonce du référendum), vous aurez un Krach boursier.
Alexis Tsipras sait parfaitement que la Grèce est à la croisée des chemins et vit son "1933". Si Syriza capitule réellement et se couche, alors ensuite aux prochaines élections, vous aurez Aube Dorée au pouvoir. Et là ce ne sera pas la même "musique", la négociation sera différente :
-il n'y aura aucune tournée des autres capitales européennes le lendemain de l'élection ;
-la sortie de l'€uro sera annoncée unilatéralement ;
-Toutes les dettes seront rejetées et jugées illégitimes ;
- L'Ex Troika sera reconduite à la frontière ;
-Le défaut de paiement sera immédiat ;
-La banque centrale d'Athènes prendra ses ordres du nouveau gouvernement fasciste
-Les premiers tampons 'Drachme" seront apposés sur les €uros dans les 15 jours qui suivent ;
-La dévaluation de la nouvelle monnaie sera lancée
-Et toute l'idéologie du rejet des étrangers se mettra en marche
Puis d'autres pays européens tomberont dans l'extrême droite... et sortiront de l'Union Européenne cette fois ci, entraînant vers l'abime le continent !
Et après 1933, il y a 1939 !!!