L'affaire
a fait quelques vagues :
José Manuel Barroso vient
d'être
recruté par la banque
d'affaires
Goldman
Sachs pour lui servir de conseiller dans la gestion du Brexit. « José
Manuel va apporter une analyse et une expérience immense à Goldman
Sachs, et notamment une profonde compréhension de l'Europe »,
a
indiqué la
banque dans
son communiqué.
Un
joli petit carnet d'adresses également, aurait-elle dû préciser,
car « José Manuel » ( on est
cool-raoul
chez
GS
: on se claque
des bises et on
s'appelle par le prénom ) « a
servi comme président de la Commission européenne de 2004 à 2014, et en
tant que premier ministre du Portugal de 2002 à 2004 ».
Et quel président de la Commission fut il !
Comme l'explique ici l'eurodéputé Emmanuel Maurel, c'est sous son
règne, par exemple, qu'a été lancé le projet de Traité de
libre-échange transatlantique :
« le
TAFTA est plutôt une idée européenne, en tout cas au départ.
C'est la Commission Barroso qui a ouvert ce débat, en partant du
constat d'une croissance faible et d'un niveau de chômage élevé,
et parce que les économistes de la Commission sont incapables
d'imaginer autre chose que de la dérégulation pour y remédier. Ils
ont donc recherché quel était le grand marché qui pourrait tirer
la croissance européenne, et dont le modèle serait proche du nôtre.
La Commission s'est naturellement tournée vers les États-Unis,
d'autant que José
Manuel Barroso est lui-même
un atlantiste éperdu ».
***
Éperdu,
on peut le dire. Et
ça n'a pas peu joué dans certains des choix qu'il a faits en tant
que Premier ministre lusitanien.
Il
y a quelques jours était
publié en Grande-Bretagne le rapport Chilcot, qui rappelle à notre bon souvenir les conditions dans lesquelles s'effectua
l'invasion de l'Irak en 2003. Le
moment est donc idéal
pour
rappeler le
rôle que
« José Manuel », ami
de Tony Blair,
joua dans
cette affaire.
Dans
un portrait sans
complaisance de
José
Manuel Barroso,
Jean Quatremer explique par exemple ici :
« alors Premier ministre du Portugal, [Barroso]
accueille avec empressement, le 16 mars 2003 aux Açores, le
fameux « sommet » réunissant George W. Bush, Tony Blair et
José María Aznar, au cours duquel la guerre [en
Irak]
fut lancée ». Le
journaliste de Libération
précise ici : « [Barroso] a
ensuite joué un rôle trouble dans le transfert des prisonniers vers
Guantanamo, laissant les avions de la CIA emprunter les aéroports et
l’espace aérien portugais. Jamais il n’a regretté son soutien
indéfectible à George W. Bush ». Ainsi,
de
deux choses l'une : soit Jean Quatremer s'est brutalement mué
en « europhobe complotiste » voyant la main diabolique
des Zétazuniens et de la CIA
à
l’œuvre
partout.
Soit
- et c'est le plus probable - « Jojo-Manu » a donné les
gages nécessaires
pour
lui permettre d'être recruté
à terme par une grande banque américaine. Ce
qui est désormais chose faite.
***
Ceci
dit, il y a ceux qui vont se finir chez Goldman Sachs, et il y a ceux
qui y commencent. Quel
meilleur
endroit, en
effet,
pour s'initier au beau métier d'Européen professionnel ?
Mario
Draghi, notre
Banquier central, a donc fait GS d'abord,
et
l'Europe ensuite.
Plus
précisément,
il a œuvré
au sein de la banque d'affaires
de
2002 à
2005.
Or en 2000, la filiale britannique de GS,
Goldman Sachs International, avait
vendu
au gouvernement grec
de
Kóstas
Simítis des
« conseils » et autres « solutions »
lui
permettant de
masquer une partie de sa dette, et de remplir les critères aptes
à qualifier le pays
pour
l'euro.
Certes,
c'était deux
ans
avant l'arrivée de Draghi.
Mais
celui-ci peut-il vraiment, comme
il
l'a toujours affirmé, n'en avoir rien su ? Les
produits dérivés à base d'obligations grecques utilisés pour
l'entourloupe ont tout
de même été
conservés par GS
jusqu'en
2005,
date
à laquelle ils ont
été revendus à la National
Bank of Greece.
Pendant tout
ce temps, Draghi
occupait les fonctions
précises de....« vice-président
pour l'Europe-Goldman Sachs International, entreprises et dette
souveraine »....
***
En
tout cas,
l'Italien a
eu
tout le temps de regretter
son « ignorance ».
Car le moins que l'on puisse dire, c'est que l'appartenance grecque
a l'euro lui a donné du
boulot.
La
Banque centrale européenne, en effet, a été aux avants-postes du
travail de sape entrepris
contre le gouvernement Syriza entre
janvier et
juillet 2015. C'est elle avant tous
les autres -
avant
même le ministre allemand Wolfgang Schäuble - qui a obtenu la
capitulation d'Alexis Tsipras et la signature par celui-ci du
mémorandum de juillet 2015. Elle était la seule, en effet, à
disposer des instruments techniques permettant d’affaiblir
suffisamment le pays, et
de l'obliger
à rendre les armes.
Or
Mario Draghi n'y
est pas allé de main morte. Dès le début du mois de février 2015,
à peine Tsipras arrivé aux responsabilités, la
BCE coupait l'accès des banques commerciales grecques à la procédure de refinancement normal. Elle
les réduisait à se financer
via
la liquidité d'urgence ( Emergency
Liquidity
Assistance,
ELA
), les
mettant ainsi à la merci d'une
Banque
centrale seule capable de réévaluer
régulièrement le plafond de cet
ELA.
La
BCE le
fit d'ailleurs
au
compte gouttes, et
toujours
en
fonction de la tournure prises
par les
négociations entre la Grèce et ses
créanciers.
Enfin,
sitôt connue la décision d'Alexis Tsipras d'organiser le
référendum du 5 juillet 2015, le plafond de l'ELA fut bloqué, et
les banques grecques contraintes de fermer. Le
but était
bien sûr de générer un sentiment de panique et de peser sur les
résultats du scrutin.
Ce fut en vain, et le « Oxi »
l'emporta largement. Mais les banques hellènes
étaient
déjà fort mal en point, et
le
pays à bout de fatigue.
On
connaît la suite : le « non » fut converti en
« oui », le référendum oublié, et le mémorandum
signé.
***
Il
serait dommage, tant qu'on en est a se rappeler le temps du
maquillage des comptes publics grecs, de ne pas évoquer l'un de ceux
qui, en tant que gouverneur
de la Banque centrale hellénique jusqu'en
2002,
y
participa. Lucas
Papademos,
par
ailleurs ancien vice-président de la Banque centrale européenne
(2002-2010) fut ensuite nommé premier ministre en Grèce pour y
prendre la tête d'un gouvernement de technocrates (pardon, d'un
gouvernement « d'union nationale ») chargé
de résoudre.... la crise de la dette. Lucas Papademos est passé par
Goldman Sachs.
Il
serait dommage, tant qu'on en est à se rappeler le temps des
gouvernements de technocrates
(pardon,
des
gouvernements
« d'union nationale ») dans
les pays d'Europe du Sud, de ne pas évoquer celui de Mario Monti, ancien conseiller de la banque d’Italie, ancien
commissaire européen, et
devenu président du Conseil en Italie en 2011. Mario Monti est passé
par Goldman Sachs.
Il
serait dommage, tant qu'on en est à....
Bon, ça suffit maintenant.
Il y en a d'autres. Pour savoir qui ils sont, on consultera par exemple cet article du site Rue89,
ou celui-ci, paru dans Le
Monde.
Après
ça, si l'on n'en a pas encore marre, si l'on souhaite faire une thèse dessus voire si l'on ambitionne de devenir à terme un spécialiste mondialement reconnu du sujet, on
pourra
voir ce documentaire d'Arte daté de 2012, consacré à Goldman
Sachs et dont voici la vidéo de présentation.
[ Nota :
merci
d'éloigner les enfants avant de cliquer sur la vidéo car
rien ne permet d'affirmer avec certitude qu'il ne s'agit
pas en
réalité d'un
film
d'Hitchcock
].
La commission européenne est-elle une annexe de goldman-Sachs ? Goldman-Sachs une annexe de la commission européenne ? Cocher la case correspondant à la bonne réponse.
RépondreSupprimerLa bonne réponse est bien sûr la première. Goldman-Sachs existait cent ans avant que ne soit instituée la commission européenne et existera peut-être cent ans après la disparition de son éphémère annexe...
Viva la ploutocratia !!!
RépondreSupprimerE-Gwen.
David Folkerts-Landau est le chef économiste de la plus grande banque allemande, la Deutsche Bank.
RépondreSupprimerDimanche 10 juillet 2016, il vient de tirer la sonnette d'alarme :
les banques privées européennes ont besoin d'être recapitalisées en urgence, sous peine d'être déclarées en faillite.
Montant de l'addition : 150 milliards d'euros !
Contribuables européens, préparez-vous à payer 150 milliards d'euros pour sauver les banques européennes de la faillite !
Source : le journal allemand DIE WELT.
Le chef économiste de la Deutche Bank réclame 150 milliards.
L'Europe risque une nouvelle crise bancaire. David Folkerts-Landau, chef économiste à la Deutsche Bank, demande un vaste programme de sauvetage de l'Union Européenne. Les créanciers privés ne devraient pas participer.
http://www.welt.de/finanzen/article156924408/Deutsche-Bank-Chefoekonom-fordert-150-Milliarden.html
Et bravo pour le titre, "l'Europe, c'est la paie" !
RépondreSupprimerBonjour Denis.
SupprimerOui, c'est un beau jeux de mot! François Asselineau de l'UPR l'avait d'ailleurs déjà utilisé il y a quelques années pour le titre de l'une de ses conférences, qui est d'ailleurs très intéressante et que je vous invite à visionner:
https://www.upr.fr/conferences/leurope-cest-la-paie
Bien à vous.
Et au passage : bravo les Anglais ! Bravo les Britanniques ! Chapeau ! Ils savent, eux, ce qu'est la démocratie. Cameron a annoncé sa décision de démissionner, moins de trois semaines plus tard, un nouveau premier ministre va être nommé. Et que dit-elle ? : "Le Brexit c'est le Brexit !". Chapeau !
RépondreSupprimer«L'Europe, c'est la paie» est aussi le titre d'une conférence de François Asselineau.
RépondreSupprimerOui, de 2011, on me l'a dit 2075963 fois. Si j'avais su, je l'aurais plagié bien avant.
SupprimerVous les payez combien, vos trolls, pour qu'ils harcèlent les gens à longueur de journée ? Ça doit rapporter vu l'énergie déployée.....
Barroso
RépondreSupprimerGoldman-Sachs embauche Barroso. Harlem Désir demande à ce dernier de renoncer. Cherchez l'erreur !...
Les USA dirigent le monde (à commencer par l'Europe), Goldman-Sachs dirige les USA, et donc les USA et l'Europe, et un petit sous-secrétaire d'Etat français fait la grosse voix, pensant être entendu ?!... Valls a dû demander un volontaire : il n'y avait qu'Harlem Désir pour ne pas se rendre compte du ridicule d'une telle demande.
Ce texte oppose vraiment démocratie et libéralisme économique. C'est intéressant dans la mesure où les faibles moyens de la démocratie (le vote) ne sont pas vraiment de taille face à ce duel. Le seul vrai contre-pouvoir, c'est la presse et tout ce qui permet de faire évoluer l'opinion publique, histoire de remettre un peu de pression sur le politique, souvent à la charnière démocratique. J'ai moi-même écrit un très court billet sur ce point :
RépondreSupprimerhttp://gauchiste.fr/post/2016/08/16/La-charni%C3%A8re-d%C3%A9mocratique