Chouette : le champ lexical du désastre européen vient de s'enrichir d'un nouveau mot ! Une pierre dans le jardin des déclinistes, qui ne pourront plus dire que la langue s’appauvrit. Quant aux amoureux des lettres classiques, qu'ils soient rassurés : la Grèce demeure l'inspiratrice des inventeurs de concepts.
On connaissait le « Grexident », une formule belle comme l'antique que l'on doit à l'imaginatif ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble. Au mois de mars, ce dernier considérait en effet qu'en cas d'échec des négociations entre la Grèce et ses « partenaires », on ne pourrait exclure longtemps un « Grexident », c'est à dire une sortie d'Athènes de la monnaie unique par accident. Ceci, force est d'en convenir, est bien plus diplomatiquement correct que « Grexpulsion ».
Bien sûr, on connaît également le Grexit, qui signifie simplement « sortie de la Grèce de l'euro », sans plus de précision. Ce qui rend infini le champ des possibles : sortie par mégarde, par erreur, par inadvertance, sur un malentendu, pour aller prendre l'air, pour faire une blague trop rigolote, etc. L'avenir, de toute façon, livrera bientôt son verdict.
Mais comme il prend tout son temps pour éclore, l'avenir, certains ont décidé de faire dans l'inventivité, afin de patienter en s'amusant.
C'est ainsi qu'un économiste de Citigroup, Ebrahim Rahbari, à l'origine, déjà, de la contraction « Grexit », vient d'inventer le « Grimbo ». Il s'agit d'une contraction de « Grèce » et de « limbo ». Elle signifie qu'aucune solution ne serait trouvée prochainement, ni aucune option radicale décidée. Du coup, Athènes resterait « dans les limbes » pour un bon moment encore.
Rahbari détermine ainsi plusieurs « scénarios gris » possibles, dont on peut trouver le détail sur Zero Hedge :
1/ Un nouvel accord est trouvé, mais seulement après mise en œuvre d'un contrôle des capitaux ou après un défaut partiel. Cela se produirait après un choc du type suivant : décision de la BCE de limiter l'accès des banques grecques à la liquidité d'urgence (ELA), qui est désormais la seule manière pour ces banques de se refinancer, décision de Tsipras de convoquer un référendum ou, enfin, incapacité d'Athènes à honorer l'une de ses échéances.
2/ Incapacité des deux partis à aboutir à un accord. La Grèce est alors contrainte de faire partiellement défaut. Un contrôle des capitaux est instauré mais on ne se résout pas encore au Grexit.
3/ Pas d'accord entre Athènes est ses créanciers. La Grèce se trouve à court de liquidités et se voit contrainte de mettre en circulation des IOU (I owe you), autrement dit une véritable double monnaie, à usage strictement interne et qui lui servirait à payer se fonctionnaires. Un scénario déjà évoqué ici, et qui ne suppose pas lui non plus - en tout cas pas immédiatement – une sortie de l'eurozone.
Au bout du compte, le Grimbo se décline en plusieurs « non-solutions » provisoires, chacune permettant de faire traîner les choses indéfiniment, et pouvant aboutir aussi bien à un Grexit qu'à.... un « Grexin », si un accord est finalement trouvé sur le plus long terme (donc si les poules se mettent à avoir des dents).
Il paraît que chacun peut ainsi jouer à enrichir le vocabulaire. Ici par exemple, un lecteur du Financial Times, probablement né bien avant l'avènement de Najat Vallaud-Belkacem, propose « Grexodus », au motif que « le mot exit est d'origine latine, alors que le mot exode est d'origine grecque ».
En attendant, l'opinion hellène se prépare lentement mais sûrement. Comme expliqué là, une étude d'opinion montre que près de 69 % des Grecs interrogés pensent désormais possible une sortie de la monnaie unique et que 20 % la souhaitent. Ils étaient moins de 10% avant les élections de janvier, et n'étaient encore que 16 % il y a une dizaine de jours....
Un gringo qui invente un Grimbo? Oh, oh! Pour la bande-son, Limbo (mais çà va plus vite que l'euro)? https://www.youtube.com/watch?v=hBzSW-7symU
RépondreSupprimer